À l’occasion des 30 ans de la collection Quarto des éditions Gallimard, paraît un volume consacré au duo de choc Boileau-Narcejac, dont les écrits furent adaptés par les plus grands cinéastes. À la clef, sept romans qui nous tiennent en haleine de bout en bout.

Après avoir mené des carrières solos, les écrivains Pierre Boileau (1906-1989) et Thomas Narcejac (1908-1998) vont conjuguer leurs talents pour écrire plus d’une cinquantaine de romans et nouvelles, renouveler le genre du roman policier. Ni détective fétiche, ni condamnation de l’assassin, leurs intrigues se focalisent sur le parcours psychologique d’une victime en proie à des machinations. Comme l’écrivait Narcejac, « si le roman policier était le roman du détective et le roman noir celui du bourreau, le suspense est celui de la victime ». En suivant les angoisses comme les stupeurs de celle-ci, on se délecte de la mécanique implacable imaginée par le duo qui sème l’effroi. On dévore Les visages de l’ombre (1953), Les louves (1955) ou Maléfices (1961).

Fausses pistes, cadavres qui disparaissent, morts qui réapparaissent, identités doubles, personnages tourmentés, complots démoniaques, tous les ingrédients sont là pour captiver l’attention du lecteur jusqu’au dénouement. C’est le cas au fil des sept romans réunis dans ce Quarto, tous portés à l’écran. Les auteurs sont vite devenus scénaristes-dialoguistes et adaptateurs au cinéma. Outre les romans, le volume nous retrace les parcours singuliers de Boileau-Narcejac, la déclinaison de leurs œuvres comme leur place dans la littérature policière, sous la plume de Dominique Jeannerod, grand spécialiste du genre qui dirige le groupe de recherches international Crime Friction.

Dans Celle qui n’était plus (1952), on suit la frayeur d’un représentant de commerce dupé par sa femme et sa maîtresse. Le roman est porté à l’écran par Henri-Georges Clouzot sous le titre Les diaboliques. Un film qui va lancer la carrière littéraire du duo et lui garantir un franc succès. Idem pour D’entre les morts (1958) qui nous raconte les tourments d’un homme trompé par un ami, dont s’empare Alfred Hitchcock pour réaliser Sueurs froides. La filmographie tirée de leurs écrits est impressionnante, tant au cinéma qu’à la télévision : une quarantaine de films au total. Il faut dire que leurs histoires sont rondement menées au point que le spectateur, comme le lecteur, s’y perd quand les victimes s’avèrent parfois être des bourreaux ou l’inverse. Du grand art ! Amélie Meffre
Suspense, du roman à l’écran, Boileau-Narcejac (Quarto Gallimard, 1280 p., 35€)





