Les 16 et 17/11, à l’Espace 1789 de Saint-Ouen (93), François Gremaud propose Carmen. L’opéra de Bizet revisité, avec un point final qui en fait toute la subtilité ! Accompagnée par cinq musiciennes virtuoses, la cantatrice et comédienne Rosemary Standley chante et conte, avec force humour et talent, les amours tumultueuses de la célèbre gitane.

D’abord, il y eut Phèdre !, avec un point d’exclamation. Ensuite, Giselle…, avec trois points de suspension. Désormais, il nous faut entendre Carmen., avec un point c’est tout. Un point au final, c’est presque rien certes, mais ce n’est pas rien et c’est même déjà beaucoup pour François Gremaud, le petit Suisse égaré en territoire hexagonal ! Trois héroïnes au destin funeste, entre théâtre-ballet-opéra, trois chefs-d’œuvre chacun en leur genre revisités pour la bonne cause : rendre proches et vivants ces classiques du répertoire pour les néophytes, en proposer un regard neuf et décalé pour les amateurs éclairés… La bande à Gremaud excelle en la matière !

Après Phèdre ! superbement incarnée par le fantasque Romain Daroles, il y eut donc Giselle (aux trois points de suspension…), interprétée par Samantha van Wissen : non pas le fameux ballet écrit par Théophile Gautier, mais la pièce à l’humour acidulé de l’inénarrable helvète ! Accompagnée de quatre jeunes musiciens virtuoses (violon, harpe, flûte et saxophone), la danseuse et comédienne nous contait avec humour et grâce la genèse de ce fameux ballet créé en 1841, sommet de l’art romantique. Une performance de haute volée pour celle qui devait danser et parler sans jamais perdre le souffle, endosser tous les personnages de l’œuvre, dialoguer avec la musique et le public entre entrelacs et entrechats…

Aux quatre instruments précédemment cités, s’ajoutent désormais la plainte et la tonicité du populaire accordéon pour cette Carmen. nouvelle génération sous les traits de Rosemary Standley, une superbe et détonante incarnation ! Pantalon bouffant, elle prête sa voix avec le même aplomb à son brigadier don José transi d’amour comme au toréador don Escamillo. Nous contant les prémices tumultueux à la création de l’opéra, jugé scandaleux pour l’époque, interprétant avec maestria les airs aujourd’hui mondialement connus… « De la même manière que pour Phèdre !, j’ai souhaité faire entendre l’alexandrin, je veux faire entendre le verbe de Carmen », confie François Gremaud, « Rosemary travaille respectueusement la partition originale, pour ensuite retrouver la liberté absolue ».

Revue et corrigée par François Gremaud pour le livret, Luca Antignani pour la musique, femme libre et libérée, la gitane et cigarière de Bizet impose sa puissance de caractère et de vie, bravant jusqu’à la mort ces hommes qui tentent de l’emprisonner dans leur jalousie maladive. Nous voilà de retour au premier jour de la création sur le plateau de l’Opéra-Comique en 1875, Séville sur scène et Alphonse Daudet dans la salle : entre humour et tragédie, bel canto et féminicide, une Carmen. à subjuguer vraiment le public, point final ! Yonnel Liégeois
Carmen., de François Gremaud avec Rosemary Standley : les 16 et 17/11 à l’Espace 1789 / Scène conventionnée danse de Saint-Ouen (93). Le 24/11, au TNB de Rennes (35). Le 28/11, au Théâtre de Grasse (06). Le 29/11, au Théâtre d’Arles (13). Le 30/11, à La Garance, scène nationale de Cavaillon (84). Du 19 au 23/12, au Théâtre des Célestins, à Lyon (69).





