Deux peuples, deux êtres, l’un palestinien et l’autre israélienne d’origine bulgare, tout qui les sépare et un morceau de terre qui les unit, « La maison au citronnier » selon le titre du roman de Sandy Tolan… Un cri du cœur autant qu’une leçon d’histoire.
Jusqu’en 1948 et à ce qu’ils en soient chassés lors de la première guerre israélo-arabe, « La maison au citronnier » fut habitée par les Khairi. Qui dut l’abandonner dans la douleur et le chagrin, alors que s’y installent de nouveaux émigrants, la famille Eshkenazi. Inspiré de faits authentiques, le roman de Tolan raconte la rencontre de Bachir avec Dalia à l’heure où il retourne voir la maison de son enfance en cette année 1967. Jamais la jeune israélienne ne s’était vraiment préoccupée de l’identité des anciens propriétaires, la propagande gouvernementale affirmant constamment qu’ils avaient quitté les lieux de leur plein gré !
La grande force de ce livre ? De 1948 à aujourd’hui, mêler le romanesque à l’historique, ne jamais affabuler sur cette incroyable rencontre presque inimaginable entre les deux protagonistes ! Documents à l’appui, narrer avec émotion et talent l’amitié entre Bachir et Dalia autant que la déchirure profonde entre leurs deux peuples. Comme l’affirme l’auteur dans son avant-propos, « la maison dépeinte dans cet ouvrage existe réellement, de même que le citronnier qui se trouve dans la cour ». A Ramla précisément, entre Jérusalem et Tel-Aviv… Entre blocus économique et attentats meurtriers, atermoiements de la communauté internationale et luttes fratricides entre les forces palestiniennes, Tolan dépeint avec justesse la vie au quotidien d’un peuple soumis à l’arbitraire du pouvoir israélien. Au final, Dalia transformera la maison au citronnier en maison d’accueil pour orphelins, Bachir connaîtra la prison et l’exil au fil de son combat pour l’existence de son peuple.
Plus qu’un roman, Sandy Tolan place son lecteur au cœur du conflit qui oppose les deux nations, de la fin du protectorat anglais jusqu’à aujourd’hui. Disséquant les soubresauts qui agitent la région, d’intifada en répression, peignant une « fresque poignante des destins intriqués d’Israël et de la Palestine au XXème siècle ». Entre épopée romanesque et document historique d’une rigueur incontestée, un récit d’une grande force qui met en lumière atouts et obstacles à la fin d’un conflit interminable et au retour de la paix. Yonnel Liégeois