à la Scène nationale de Vandœuvre-lès-Nancy, les 9 et 10/06, Yann-Joël Collin propose Husbands, un spectacle inspiré par le film de John Cassavetes. Avec, en sous-titre, la mention « Une comédie sur la vie, la mort et la liberté », surtout une ode en actes à l’amitié.

Les gens de théâtre s’ébrouent, après l’absence forcée qui les a privés, des mois durant, de spectateurs autres que des professionnels de la profession. En mars, Yann-Joël Collin (Cie la Nuit surprise par le jour) montrait à la MC 93 de Bobigny, face à un public restreint, une étape de la création de son spectacle inspiré par le film Husbands (1970), de John Cassavetes. Avec en sous-titre la mention « Une comédie sur la vie, la mort et la liberté », la pièce, fruit d’une traduction et d’une adaptation de Pascal Collin, est d’ores et déjà à l’affiche de la Scène nationale de Vandœuvre-lès-Nancy (1).
C’est une ode en actes à l’amitié, ainsi que fut le film, ce qui induit visiblement une connivence de longue haleine entre les acteurs, jouant quatre hommes déjà un peu mûrs en bordée occasionnelle arrosée (Cyril Bothorel, Yann-Joël Collin, Thierry Grapotte, Éric Louis) et trois femmes (Marie Cariès, Catherine Vinatier, Yilin Yang). Voilà ce qui fait tout le prix d’une réalisation où les démonstrations d’affection, les coups de gueule et les vannes, jusqu’aux silences, révèlent en sourdine l’histoire sensible d’une poignée d’êtres qui ont grandi ensemble.

Cela tient à une façon de vivre le théâtre en une bande soudée par des affinités électives, à partir d’expériences initiales communes, depuis par exemple l’école de Chaillot avec Vitez, l’entourage de Didier-Georges Gabily, les plateaux d’Olivier Py, Stanislas Nordey ou Stéphane Braunschweig. La représentation s’avance de la sorte, semée de secrets affectifs affleurant au cœur d’une dépense nerveuse sans cesse tournée vers le spectateur, indispensable témoin. Le décousu apparent, pourtant prémédité, des gestes parlants, des rires, des chamailleries, n’abolit pas le tragique sous-jacent que signifie, comme un hommage en préambule, l’évocation d’un ami mort du sida, Gilbert Marcantognini, qui fut l’alter ego de Yann-Joël Collin. Se glissant librement dans le film de Cassavetes, le metteur en scène et les siens font œuvre pie, au nom de l’éthique d’un généreux échange.
Par ailleurs, à l’Opéra Garnier, dans l’œuvre lyrique tirée du Soulier de satin, de Claudel, mise en scène de Stanislas Nordey, musique de Marc André qui est au pupitre, Yann-Joël Collin et Cyril Bothorel se partagent les rôles de l’Annoncier et de l’Irrépressible (2). Ces deux-là ne se quittent donc pas. Jean-Pierre Léonardini
(1) Les 9 et 10 juin, CCAM/Scène nationale, esplanade Jack-Ralite, rue de Parme, 54500 Vandœuvre-lès-Nancy (tél. : 03 83 56 83 56). (2) Les 5 et 13 juin.